Pour la première interview de la saison, le manager du HAC Jérôme Dunay, a accepté de répondre à nos questions dans un entretien grand format où nous avons ravivé ses souvenirs de jeune joueur, mais aussi son arrivée au club, la montée en Fédérale 1 et la saison à venir.

Bonjour Jérôme, peux-tu nous expliquer comment se sont passés tes 1ers contacts avec le rugby ?

Aucun membre de ma famille n’a pratiqué le rugby, mon père était entraîneur amateur de football, et c’est par hasard que je suis venu au rugby. La section garçon du club de gymnastique où j’étais inscrit a fermé et un des copains nous a dit avoir essayé le rugby et que c’était vraiment chouette. Du coup, les 7 membres de la section garçons gym sont allés faire un essai et nous avons tous basculé vers le rugby (en Benjamin soit les U12 actuels). Il faut dire que le club de Châteaubriant, le S.A.C (44), manquait cruellement de licenciés en catégories jeunes et ils ont su trouver les mots pour nous valoriser et nous garder. Hormis un, nous avons poursuivi notre pratique jusqu’en sénior.

Comment a évolué ta passion pour le rugby ?

Passer d’un sport individuel à un sport collectif m’a fait découvrir des moments conviviaux tels que les goûters, les déplacements en bus, où la bonne humeur était de mise. Ensuite j’ai eu l’opportunité de participer à la sélection départementale puis à la sélection régionale des Pays de La Loire.  La reconnaissance sportive m’a fait du bien et m’a conforté dans l’idée que le rugby était fait pour moi. J’ai ensuite intégré une section sport-études à Nantes et rejoint le club phare du coin à savoir le SNUC (aujourd’hui le Stade Nantais).

Pourquoi avoir décidé de te tourner vers l’encadrement des joueurs ?

Un peu par obligation car dans le club à Châteaubriant, les encadrants étaient peu nombreux, bien évidemment tous bénévoles, et il arrivait que nous soyons amenés à nous entraîner en autonomie ou semi-autonomie. En ce cas, les gars les plus débrouillés s’organisaient pour proposer des exercices ou des situations de jeu qui reconnaissons le maintenant ne devaient pas ressembler à grand chose…mais notre exigence se limitait avant tout à se retrouver entre copains. Rapidement, j’ai voulu progresser dans les contenus et de par ce fait je me suis inscrit à la formation fédérale 1er cycle. Afin de respecter les obligations de la formation, je me suis impliqué à l’école de rugby.

Peux-tu nous parler de tes années d’études à Toulouse ?

J’avais passé un tronc commun d’éducateur sportif à Nantes mais il n’y avait pas de formation spécifique rugby en continu dans la région. En me renseignant, j’ai appris que la formation était proposée au CREPS de Toulouse. Un partenaire, notre arrière Marc CAMBON, m’a mis en contact avec un club de la ville rose, le FCT (aujourd’hui FCTT) car il y avait joué et était proche du Président. J’ai réussi les tests d’entrée au CREPS et passé mes diplômes BE Rugby et BEESAPT (sport pour tous). Ensuite, j’ai été salarié 4 ans au FCT comme responsable de l’école de rugby.

Comment se sont passées tes premières années dans un staff technique ?

Tout d’abord, j’ai été l’adjoint de personnes plus expérimentées et me suis limité au domaine spécifique des 3/4. Puis après plusieurs années, j’ai été amené à prendre la responsabilité d’une équipe en tant que Manager et mes fonctions variaient au regard des compétences des collègues qui composaient le staff. Très rapidement, l’importance d’une très forte cohésion dans un staff m’a semblé être un élément essentiel pour entraîner un groupe. Les expériences d’encadrement d’équipes départementales et régionales m’ont conforté dans l’envie de coacher des groupes tournés vers la compétition.

Comment es-tu arrivé à Rouen ?

Après 4 ans au FCT et que mon contrat emploi-jeune soit arrivé à son terme, un de mes coaches, Philippe ROUGE-THOMAS, connaissait le nouvel entraîneur de Rouen (Karl JANICK) car ils avaient été champions de France ensemble avec le Stade Toulousain. Il savait que j’avais envie de me rapprocher de ma région natale et comme lui et moi n’étions pas très forts en géo, on pensait que Rouen se situait pas très loin de Nantes … Cela est vrai si on plie bien la carte. Je suis venu faire un essai de quelques jours comme joueur au mois de mai qui a été positif et en juillet 1999, j’ai débarqué en Normandie.

Quel a été ton parcours au sein de ce club ?

J'étais joueur et salarié du club en tant qu'éducateur sportif ce qui n'était pas toujours évident. Dans un premier temps, j'ai occupé la fonction de responsable de l'école de rugby puis mes fonctions se sont élargies et j'ai chapeauté l'ensemble du secteur formation. Après 5 ans, un désaccord profond avec la Direction du club a motivé mon départ. Cela s'est fait en bonne intelligence et je suis toujours resté en lien avec le RNR (à cette époque le RCR).

Pourquoi avoir choisi d'entraîner l'équipe du HAC Rugby ?

C'est presque un accident car au départ j'étais avec Grégoric BOULY en contact avec le Président du HAC, Olivier D'OUTRELEAU, afin d'échanger sur le développement du club. Notre souhait était d'aider au mieux le club doyen en lui partageant notre expérience au RNR qui nous avait vu passer de la Fédérale 2 à la Pro D2. Lorsqu'Olivier nous a fait part de sa volonté de recruter un nouveau coach, nous avons activé notre réseau. Pas convaincu par certaines candidatures, Olivier m'a proposé sur une boutade d'occuper le poste. Après une nuit de réflexion, je l'ai rappelé pour lui demander si la proposition était sérieuse ce qu'il m'a confirmé. Mon envie de retrouver le terrain était très forte car mes fonctions de Directeur du Centre de Formation m'en avaient éloigné. Nous nous sommes rapidement mis d'accord sur les conditions de ma venue et j'ai signé. Le fait de connaître de nombreux joueurs et de les avoir entraînés soit en club, soit en sélection, a été également un élément favorable.

Photo Matis Millet

Quel est ton regard sur la saison passée ?

Le sentiment d'avoir vraiment mérité notre montée avec une progression des 2 groupes. Je n'oublie pas que la réserve a disputé les phases finales ce qui n'était pas arrivé depuis longtemps. Notre poule était relevée et c'est de haute lutte que nous avons pû terminer 1er avec seulement 2 défaites en phases régulières. Terminer meilleure attaque de cette phase prouve aussi que l'ADN offensif du club est toujours présent.

Quels ont été selon toi les moments majeurs de cette montée ?

La pré-saison et le stage de St Malo qui a posé les bases de fonctionnement et fixé clairement les objectifs. Notre victoire à Courbevoie et le match référence à St Malo ont été clés pour performer en poule. Enfin, les grosses prestations en phases finales à Dôle et pour la réception de St Priest nous ont apporté beaucoup de satisfactions.

Photo Matis Millet

Le calendrier a donc une grande importance dans une saison ?

Énormément !  La prise rapide de la tête de la poule s'est faite en grande partie grâce à la victoire à Courbevoie qui n'avait pas eu une préparation estivale aussi poussée que la nôtre. Ensuite, tout au long de la saison lorsque les gros matches se sont présentés, nous avions une ou deux rencontres au préalable plus faciles ce qui nous permettait de monter en puissance. Seul le report du match de l'ACBB, dû au fameux trou dans la pelouse de Deschaseaux, a perturbé notre planification annuelle.

Peux-tu nous expliquer ce qu'engendre un passage d'un club de fédérale 2 à fédérale 1 ?

Un changement de règles dans des secteurs aussi importants que la mêlée et la défense. Nous devons travailler très fort ces secteurs, ainsi que les attitudes au contact, pour être à la fois en sécurité et performant. Il n'y aura aucun match facile et l'intensité des rencontres sur les phases de combat va être nettement plus élevée. Des joueurs s'y retrouveront mieux, d'autres passeront par un temps d'adaptation plus long.

L'effectif a-t-il beaucoup changé ?

Notre priorité a été de conserver un maximum de joueurs, ce qui a été rendu possible par l'envie collective de se tester au niveau supérieur. Ensuite nous avons décidé d'un recrutement ciblé sur les postes les moins fournis. La cellule de recrutement centrée autour de Samy et Marwan a travaillé durant toute la saison dernière pour que nous ne nous trouvions pas en situation d'urgence au mois de juin. C'est beaucoup de temps passé mais si l'on veut un recrutement en phase avec nos moyens, c'est indispensable.

Peux-tu nous présenter les nouvelles recrues ?

Taku ayant émis le souhait de rentrer chez lui au Zimbabwe, nous avons cherché un centre et son remplaçant est Federico VIDAL. C'est un joueur argentin, capable d'évoluer au centre mais également à l'arrière et à l'ouverture. Marcell BERNARD, 2ème ligne sud-africain, nous arrive d'Orthez. C'est un vrai 5 solide qui va nous apporter sa puissance dans le jeu et en mêlée. Jacob AKILITOA, pilier droit, va offrir d'autres solutions à droite de la mêlée car Seb LEBODO a énormément joué la saison dernière. Nous pensons aussi que Nolan LY doit encore prendre de l'expérience à ce poste car il n'a jamais connu les poussées illimitées. Les retours au club de Joris LEZAT, Thomas LEBODO, Mahamadou NIAKATE sont de bon signaux. L'expérience du monde professionnel et la polyvalence d'un Kévin MILHORAT (15-13-14) est un nouvel atout. L'arrivée d'un ouvreur supplémentaire, Vladislav ADAZYNYK, va apporter une nouvelle concurrence à Romain. Enfin notre partenariat avec le RNR a permis à des Espoirs à fort potentiel de rejoindre notre projet (Fyrmin MAHY pilier, Oliver COOPER 2ème ligne, Philippe OBREJA n°8, Matthias MENDES et Gregoire DESANTE ailiers ...) en plus de Loris LETELLIER (1) et Iban BATBY (2) ex-Espoirs RNR partis 1 an sous d'autres cieux, respectivement à Beauvais et St Jean de Luz. Des jeunes passés par les Crabos (Nils SIANO, Lucas ORION, Tom LE BON ...) vont renforcer notre équipe Espoirs et peuvent envisager de bousculer la hiérarchie s'ils performent en U25.
Enfin, certains jeunes issus de la formation Havraise doivent s'affirmer cette saison car ils en ont le potentiel, je pense évidemment à Nolan LY mais aussi à des garçons comme Victor VIVIER, Corentin PETIT, Danny MUYEMBA, Jules COTE, Yanis AISSAOUI et quelques autres encore. L'investissement à l'entrainement sera capital pour eux car ils n'ont pas eu la chance de passer par la filière haut niveau jeune. La reconnaissance de notre C.E.L* est un élément important pour l'avenir du club sur le plan de la formation.
* Centre d'Entraînement Labellisé, reconnu officiellement depuis juin 2023, dirigé par Ezéquiel CORTES.

Quels vont être les postes clés pour cette saison ?

Avant tout le 5 de devant ! Ce n'est pas pour rien que nous avons travaillé au retour de Thomas et Mahamadou ainsi qu'aux recrutements de Jacob, Iban, Oliver, Fyrmin, Tom ... Il nous fallait un autre n°8 puissant car Esava ne peut enchaîner tous les matches et Cheikhou va régulièrement basculer en 3ème ligne aile. Nous attendons impatiemment nos premiers matchs amicaux face à des équipes comme Beauvais ou Oxford Cambridge pour savoir si nous rivaliserons au centre du terrain car c'est une zone privilégiée pour mettre son jeu en place. La charnière reste essentielle dans la conduite et le respect du cadre de jeu.

Quels sont les objectifs de la saison ?

L'objectif à minima est le maintien autour de la 8ème-9ème place mais nous avons un objectif haut qui place notre ambition vers la 6ème place. Ce serait top de pouvoir disputer les phases finales pour notre 1ère année en Fédérale même si la densité de la poule avec des ogres comme Chartres, Genève, Nuits St Georges, Villefranche/Saone, Orléans et son recrutement pharaonique ... ne nous place pas dans les favoris. On a donné la 6ème place, et donc la qualification en phases finales comme objectif pour le groupe Espoir U25.

Vous jouez votre deuxième match de préparation face à Oxford et Cambridge pour un match de prestige, que signifie pour toi d'entraîner le club doyen du Rugby Français ?

J'estime que c'est une chance d'entraîner un club avec une histoire si riche tout en sachant que le passé peut être un frein si l'avenir est perçu comme inquiétant. Le rugby de demain sera forcément différent de celui d'hier. Sans renier son identité, il faut faire attention à ne pas tomber dans la nostalgie d'un passé parfois idéalisé. En tout cas, je suis très heureux d'entraîner le plus vieux club de France et le 2ème club de Normandie en terme de niveau de compétition.

Sportivement parlant, que va vous apporter ce match ?

Ce sera notre dernier match de préparation avant d'attaquer le championnat de Fédérale 1. C'est l'occasion d'évaluer nos joueurs, notre niveau de préparation physique et tactique. L'analyse de la rencontre nous permettra de voir quels secteurs mériteront une attention particulière les 2 semaines suivantes pour recevoir comme il se doit Drancy/St Denis le 17 septembre.

Quelles sont selon toi les choses à changer pour continuer à développer le club ?

Cette réponse ne m'appartient pas car c'est une réflexion collective qui doit permettre au club de grandir encore. Avant tout, il faut savoir où l'on veut aller pour tracer une feuille de route cohérente et c'est la Direction du club qui en a la responsabilité. Pour ma part, je constate que nos infrastructures actuelles sont à facteurs limitants pour fonctionner correctement sportivement. Pour envisager l'étage supérieur, la Nationale 2, il faudra sans nul doute augmenter le budget, renforcer l'organisation interne du club sans parler de poursuivre le développement du secteur formation. Toutefois, les bases sont solides et je peux vous dire par comparaison que lorsque je suis arrivé à Rouen après l'accession en Fédérale 1, le chantier était bien plus important.

Pour terminer cet entretien, que pouvons-nous souhaiter pour cette saison 2023/2024 ?

Le maintien le plus tôt possible et que l'engouement autour de notre équipe se poursuive.

Entretien réalisé par Grégory Constantin

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